« J'AI ACHETÉ UN ROBOT D'OCCASION POUR TRAIRE MES 25 VACHES »
Pour faire face au départ à la retraite de sa mère, Régis Cuny a acheté un robot d'occasion pour 75 000 €. Il a réaménagé son étable entravée en table d'alimentation et loge ses vaches sur une aire paillée dans un autre bâtiment.
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EN JUIN 2009, L'EXPLOITATION DE RÉGIS CUNY A FAIT UN BOND DANS LE FUTUR. De la traite en entravée, sa trentaine de vaches est passée au robot. Explications. « Ma mère, qui était salariée à mi-temps de l'exploitation, est partie à la retraite en 2007. J'ai dû trouver des solutions pour faire face. » Inévitablement, Régis envisage d'arrêter le lait et de le remplacer par un atelier d'une quarantaine de vaches allaitantes pour valoriser l'herbe. Un chiffrage économique du projet lui démontre d'ailleurs sa viabilité avec quelques difficultés. « La constitution d'un nouveau cheptel exigeait d'importants capitaux et je manquais de trésorerie… Mais par-dessus tout, j'aime l'élevage laitier et je ne voulais pas changer mon système. »
Une annonce parue dans le Paysan Vosgien lui permet, en septembre 2008, d'envisager une solution inattendue pour si peu de vaches : Lely Center vend un A2 Évolution d'occasion. « Je n'avais jamais imaginé en installer un chez moi. Je les ai contactés en me demandant s'ils n'allaient pas se moquer de moi en leur annonçant mon quota de 189 000 l de lait. »
10 000 € POUR LES TRAVAUX D'AMÉNAGEMENT
Son appel est pris au sérieux. Un technicien se déplace, fait un croquis d'emplacement de l'équipement et annonce le coût : 75 000 €. Régis part visiter quelques fermes équipées. Séduit par la fonctionnalité de l'équipement, il achète la machine fin octobre. Installé en 1995, l'éleveur profite de la fin de ses annuités JA pour emprunter 100 % de la somme.
Commencent alors des travaux. L'étable entravée, divisée en deux par un couloir d'alimentation, est réaménagée. D'un côté, Régis loge les petits veaux. De l'autre, il construit une table d'alimentation pour les vaches. L'éleveur abat un mur et aménage une aire paillée de 240 m2 dans un bâtiment juxtaposant où étaient logés les génisses et les taurillons. Il installe le robot à l'une des extrémités. L'ensemble de ces travaux est entièrement réalisé par l'éleveur pour un coût de 10 000 €.
La mise en service a lieu à l'été 2009. Durant un mois et demi, le robot est utilisé comme une salle de traite. Les vaches sont bloquées dans le bâtiment matin et soir. Puis elles sont lâchées à l'herbe sur une dizaine d'hectares.
À la fin de l'été, le troupeau peut accéder librement au robot sans contraintes. « J'ai laissé un point d'eau dans les prairies. Selon la météo, la distribution des fourrages à l'auge est stoppée au printemps. Mis à part quelques fraîches vêlées, je ne vais jamais chercher les vaches au parc », déclare-t-il.
Ce nouvel équipement a eu un effet spectaculaire sur la productivité des vaches. Elle se limitait à 6 500 kg et dépasse à présent 9 000 kg. Plusieurs facteurs peuvent expliquer cette évolution. Tout d'abord, l'augmentation du nombre de traites. La fréquentation atteint 2,6 traites/vache/jour en été et monte à 3,1 en hiver. Ensuite, les concentrés, distribués en totalité durant la traite, sont mieux répartis. Surtout, les vaches ne peuvent plus consommer les quantités qui ne leur sont pas destinées. « Le robot calcule les quantités à distribuer en fonction de la production réelle des derniers jours. »
Régis travaille avec deux aliments. Il a construit une dalle au-dessus du robot et installé un silo de 7 t où il stocke du tourteau de colza. Il a aussi aménagé un coffre en béton à même le sol pour stocker de l'orge. Le passage à la traite robotisée n'a pratiquement pas eu d'incidence sur les quantités consommées. « Certes, les vaches consomment 200 kg supplémentaires (1 570 kg/VL/an au lieu 1 390 kg) mais ce chiffre n'est pas significatif », analyse Benoît Dumet, contrôleur laitier à Optival.
Le coût de concentré est bien maîtrisé. Il se limite à 37 €/1 000 l sur la campagne 2009-2010, alors que la moyenne départementale est à 52 €. Régis limite aussi le déséquilibre azoté de sa ration en introduisant 40 % d'ensilage d'herbe, le reste étant constitué de maïs-ensilage.
Le passage à l'aire paillée a également contribué à faire progresser le rendement laitier. « Les vaches paraissent plus en forme, leur gabarit a augmenté en moyenne de 50 kg », déclare l'éleveur. Le changement de mode de logement n'a pas eu d'impact sur la qualité du lait. En 2010, mis à part deux prélèvements à plus de 250 000 cellules, les comptages étaient tous inférieurs à ce seuil. Les taux butyriques ont aussi légèrement régressé avec seulement un mois à plus de 800 spores. « En hiver, je règle le nombre de brossages à trois pour bien nettoyer les mamelles. L'été dernier, j'ai conservé ce même rythme alors que cela n'était pas nécessaire. »
Régis peut se le permettre. Contrairement à d'autres éleveurs dont la stalle est proche de la saturation, son robot ne fonctionne que huit heures par jour. « Je n'ai pas pris de contrat de maintenance. À l'époque où je l'ai mis en service, le forfait minimum coûtait environ 2 000 €/an avec une visite tous les deux mois. Le déplacement et la main-d'oeuvre étaient compris dans ce prix. Je fais appel à un technicien trois à quatre fois par an pour réviser la machine. Ce service avec les pièces et les produits d'hygiène me revient à 2 400 € par an. » Régis est surtout gagnant sur le temps de travail. Auparavant, six heures par jour étaient nécessaires pour assurer la traite, le curage, le paillage et les soins aux veaux. À présent, l'éleveur passe une heure le matin autour de ses vaches. « Le suivi informatique me prend dix minutes. Je me suis rapidement habitué à cette nouvelle façon de gérer le troupeau. Je désile les fourrages et je donne du lait aux veaux. » Et le soir, le raclage de l'aire d'alimentation, le paillage et les soins aux veaux sont réalisés en quarante-cinq minutes.
Sur le plan financier, le pari est gagnant. L'annuité du robot lui revient à 9 000 €/an alors que le travail à mi-temps de sa mère coûtait 12 000 à 13 000 €. L'aire paillée peut même accueillir quarante vaches.
« Je pourrais produire jusqu'à 400 000 l de lait. Mais je ne suis pas favorable à une augmentation de la production. Cela fait baisser le prix du litre de lait », explique Régis Cuny.
L'éleveur est satisfait de son investissement. Installer une salle de traite n'était pas possible chez lui. « J'aurais dû agrandir mon bâtiment mais je suis bloqué car nous sommes situés à proximité de maisons d'habitation. »
NICOLAS LOUIS
Une étable entravée réaménagée. Sur la partie de droite, le couloir d'alimentation mesure 24 m de long et 4 m de large. Il est raclé tous les jours à l'aide d'un tracteur.
Une aire paillée de 240 m2. Ce bâtiment est accolé à l'étable entravée réaménagée qui se situe sur la droite. Le paillage est réalisé chaque jour à la main et permet à l'éleveur d'être parmi son troupeau.
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